Monsieur Foglia, Louise Latraverse... et moi... et nous...
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Monsieur Foglia, Louise Latraverse... et moi... et nous...
Louise nous parle de Pierre Foglia et ce qu'elle dit me rejoint car je pense comme elle. Je le savourais, je lisais ses textes avec toujours une joyeuse anticipation. Parfois, il me faisait fâcher, d'autres fois, il me faisait réfléchir, m'attendrissait ou me faisait voir un aspect d'un événement que je n'avais pas vu....
A lire, excellent article:
MONSIEUR FOGLIA
LOUISE LATRAVERSE
COLLABORATION SPÉCIALE (La Presse aujourd'hui)
Comme vous peut-être, chers lecteurs, j’ai été souvent à l’intérieur, ces derniers mois, avec mes épaisseurs de laine, mes bas de bûcheron, mes châles et les couvertures qui recouvraient mon divan blanc neige.
Je lisais. Les journaux que j’ai moins souvent le temps de fréquenter en d’autres saisons. Des livres m’accompagnaient dès que j’ouvrais l’œil ou que je m’apprêtais à les fermer pour la nuit. Dispersés sur mon lit et dans les autres pièces de la maison. Ils sont mes fidèles compagnons, et le web, bien sûr.
Depuis quelque temps, j’allais voir si monsieur Foglia ne serait pas là, un matin, par bonheur. Je persistais. Toujours l’absence. J’aurais pu téléphoner à La Presse, m’improviser journaliste d’enquête. Appeler quelques amis. Exploiter mon réseau de fouines-qui-savent-tout. J’ai résisté. Et puis samedi dernier, le verdict est tombé. Monsieur Foglia prend sa retraite.
J’ai toujours dit que le jour où monsieur Foglia n’écrirait plus, je ne renouvellerais pas mon abonnement. Ironie du sort. Ce que la vie nous réserve est plus surprenant que tous les scénarios que l’on s’invente. Il n’écrira plus régulièrement. Et j’écris dans son journal ! Le syndrome de l’imposteur fait son œuvre. Même en me bouchant les oreilles, à chaque mot que j’écris, j’entends la voix qui me dit : « Es-tu folle ? Pour qui tu t’prends ? »
C’est Georges-Hébert Germain qui m’avait parlé de lui. Il écrivait dans les pages sportives, à l’époque. « Même si le sport ne t’intéresse pas, lis-le, il est formidable. » J’ai suivi son conseil et ne l’ai jamais regretté. Avant de lire quoi que ce soit dans le journal, j’allais directement à sa page. Jamais il ne m’a ennuyée. Jamais. Même quand il était bougon, de mauvaise foi, cassant avec ses cibles préférées, ses têtes de Turc, je le suivais. Même quand je n’étais pas d’accord ; que je trouvais qu’il exagérait, je continuais. C’est ce que j’aimais chez lui. Il ne lâchait pas son os.
J’aimais son style. Il construisait une histoire et la déconstruisait dans la même page. Comme on fait avec un jeu de Lego. Un enfant, un joueur, un fanfaron qui n’avait peur de rien. Quand il partait écrire sur la guerre au Moyen-Orient ou ailleurs, le danger était partout et autour de lui ! Ses papiers bouleversants sur la guerre en Irak.
L’humain. L’humain, toujours au cœur de ses préoccupations. Je me suis souvent inquiétée pour lui. Je trouvais qu’il prenait trop de risques, je voulais qu’il revienne sain et sauf. Avec les années, une intimité, un lien important s’étaient construits. Il faisait partie de ma vie. J’étais une lectrice fidèle comme vous tous. Il allumait mes lanternes, me montrait l’envers du décor, démolissait les dogmes, les hypocrisies, les injustices. Un archéologue de l’âme. Il fouillait dans les parties cachées de nos personnalités pour trouver ce que l’on ne voulait montrer au grand jour. Notre pauvre humanité. Il nous provoquait. Il ne se gênait pas.
Arrivaient les jours où l’amour de ses chats venait nous distraire des mauvaises nouvelles qui continuaient d’affluer. On les connaissait tous. On s’inquiétait avec lui quand les ratons laveurs ou les rats musqués, je ne sais plus, venaient rôder autour de ses minous. Il tempérait nos inquiétudes en nous emmenant faire des tours de vélo dans sa campagne et aux États tout près de la frontière. On savourait avec lui sa confiture de mirabelles. Au début, alors qu’on n’en trouvait nulle part ici, on se garrochait pour chercher ce fruit rare ou s’en faire acheter à Paris.
Ses merveilleuses maisons ! Sa délicieuse fiancée qui le remettait dans ses traques quand il exagérait. L’amour qu’il lui portait, on le devinait à chaque mot. Ses enfants et ses manques en tant que père. Discret sur ses sentiments et ses émotions. Pas d’épanchement de ce côté-là, s’il vous plaît. Il détestait les compliments. Ne fallait surtout pas lui dire qu’on l’aimait.
J’ai le même âge que lui. Autodidacte en tout, comme lui.
Ratoureuse aussi, comme lui. Je ne lui écris pas directement, pas folle. Toutes ces confidences pour vous dire à quel point j’apprécie de le lire, qu’il me manquera, que je l’espère heureux même s’il s’en crisse. Et que je le remercie pour tout.
A lire, excellent article:
MONSIEUR FOGLIA
LOUISE LATRAVERSE
COLLABORATION SPÉCIALE (La Presse aujourd'hui)
Comme vous peut-être, chers lecteurs, j’ai été souvent à l’intérieur, ces derniers mois, avec mes épaisseurs de laine, mes bas de bûcheron, mes châles et les couvertures qui recouvraient mon divan blanc neige.
Je lisais. Les journaux que j’ai moins souvent le temps de fréquenter en d’autres saisons. Des livres m’accompagnaient dès que j’ouvrais l’œil ou que je m’apprêtais à les fermer pour la nuit. Dispersés sur mon lit et dans les autres pièces de la maison. Ils sont mes fidèles compagnons, et le web, bien sûr.
Depuis quelque temps, j’allais voir si monsieur Foglia ne serait pas là, un matin, par bonheur. Je persistais. Toujours l’absence. J’aurais pu téléphoner à La Presse, m’improviser journaliste d’enquête. Appeler quelques amis. Exploiter mon réseau de fouines-qui-savent-tout. J’ai résisté. Et puis samedi dernier, le verdict est tombé. Monsieur Foglia prend sa retraite.
J’ai toujours dit que le jour où monsieur Foglia n’écrirait plus, je ne renouvellerais pas mon abonnement. Ironie du sort. Ce que la vie nous réserve est plus surprenant que tous les scénarios que l’on s’invente. Il n’écrira plus régulièrement. Et j’écris dans son journal ! Le syndrome de l’imposteur fait son œuvre. Même en me bouchant les oreilles, à chaque mot que j’écris, j’entends la voix qui me dit : « Es-tu folle ? Pour qui tu t’prends ? »
C’est Georges-Hébert Germain qui m’avait parlé de lui. Il écrivait dans les pages sportives, à l’époque. « Même si le sport ne t’intéresse pas, lis-le, il est formidable. » J’ai suivi son conseil et ne l’ai jamais regretté. Avant de lire quoi que ce soit dans le journal, j’allais directement à sa page. Jamais il ne m’a ennuyée. Jamais. Même quand il était bougon, de mauvaise foi, cassant avec ses cibles préférées, ses têtes de Turc, je le suivais. Même quand je n’étais pas d’accord ; que je trouvais qu’il exagérait, je continuais. C’est ce que j’aimais chez lui. Il ne lâchait pas son os.
J’aimais son style. Il construisait une histoire et la déconstruisait dans la même page. Comme on fait avec un jeu de Lego. Un enfant, un joueur, un fanfaron qui n’avait peur de rien. Quand il partait écrire sur la guerre au Moyen-Orient ou ailleurs, le danger était partout et autour de lui ! Ses papiers bouleversants sur la guerre en Irak.
L’humain. L’humain, toujours au cœur de ses préoccupations. Je me suis souvent inquiétée pour lui. Je trouvais qu’il prenait trop de risques, je voulais qu’il revienne sain et sauf. Avec les années, une intimité, un lien important s’étaient construits. Il faisait partie de ma vie. J’étais une lectrice fidèle comme vous tous. Il allumait mes lanternes, me montrait l’envers du décor, démolissait les dogmes, les hypocrisies, les injustices. Un archéologue de l’âme. Il fouillait dans les parties cachées de nos personnalités pour trouver ce que l’on ne voulait montrer au grand jour. Notre pauvre humanité. Il nous provoquait. Il ne se gênait pas.
Arrivaient les jours où l’amour de ses chats venait nous distraire des mauvaises nouvelles qui continuaient d’affluer. On les connaissait tous. On s’inquiétait avec lui quand les ratons laveurs ou les rats musqués, je ne sais plus, venaient rôder autour de ses minous. Il tempérait nos inquiétudes en nous emmenant faire des tours de vélo dans sa campagne et aux États tout près de la frontière. On savourait avec lui sa confiture de mirabelles. Au début, alors qu’on n’en trouvait nulle part ici, on se garrochait pour chercher ce fruit rare ou s’en faire acheter à Paris.
Ses merveilleuses maisons ! Sa délicieuse fiancée qui le remettait dans ses traques quand il exagérait. L’amour qu’il lui portait, on le devinait à chaque mot. Ses enfants et ses manques en tant que père. Discret sur ses sentiments et ses émotions. Pas d’épanchement de ce côté-là, s’il vous plaît. Il détestait les compliments. Ne fallait surtout pas lui dire qu’on l’aimait.
J’ai le même âge que lui. Autodidacte en tout, comme lui.
Ratoureuse aussi, comme lui. Je ne lui écris pas directement, pas folle. Toutes ces confidences pour vous dire à quel point j’apprécie de le lire, qu’il me manquera, que je l’espère heureux même s’il s’en crisse. Et que je le remercie pour tout.
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